Frédéric Amouretti

Amouretti, Joseph, François, Frédéric, félibre et journaliste français, né à Toulon (Var) le 18 juillet 1863*, décédé à Pierrefeu (Bouches-du-Rhône) le 25 août 1903.

Fils d’un médecin provençal, Frédéric Amouretti grandit à Cannes qui tint une grande place dans sa vie. Après avoir passé en 1886 une licence de lettres à l’université d’Aix, il enseigna l’histoire à Béziers et à Lyon (1887-1890) puis échoua à l’agrégation et, renonçant au professorat, s’installa à Paris en 1890 et y vécut de journalisme. D’autre part, disciple enthousiaste de Mistral et reçu félibre mainteneur dès 1882, il fonda cinq ans plus tard un cercle félibréen à Cannes et se fit rapidement reconnaître comme le chef de l’aile marchante du Félibrige, celle qui souhaitait donner une traduction politique à l’activité littéraire du groupe. Il fit même scandale par sa fameuse Déclaration des jeunes félibres fédéralistes, rédigée en collaboration avec Maurras et lue le 22 février 1892 devant l’assemblée des notables du mouvement. Catholique, royaliste et décentralisateur, disciple de Le Play et La Tour du Pin, Amouretti joua dans la dernière décennie du siècle un rôle décisif pour redonner cohérence et vie aux idées traditionalistes, au moment où l’échec boulangiste et le Ralliement précipitaient le déclin politique des monarchistes désorientés. Sans jamais avoir publié un seul ouvrage, par ses seuls articles et ses relations personnelles, il exerça peu à peu un véritable quoique discret magistère intellectuel sur les non-conformistes des années 1890 et les futurs cadres de la droite française : Maurice Barrès, rencontré en 1893, Paul Bourget, Jules Lemaitre et surtout Charles Maurras. Sous des pseudonymes divers (J. François, Bezaudun, Lérins) ou de façon anonyme, plus rarement en signant de son nom, il a collaboré notamment à La Libre Parole naissante, à La Cocarde de Barrès, à La Revue bleue et aux principaux organes royalistes (Le Soleil, La Gazette de France, plus tard à L’Action française), sans d’ailleurs que son nom soit connu du grand public.
Dans l’affaire Dreyfus, ce pur intellectuel prit nettement parti contre le condamné et surtout contre ses partisans, mais sans se mettre beaucoup en avant, ce qui explique qu’il ne fut pas, contrairement à son ami Maurras, la cible des attaques dreyfusardes. Démissionnaire du dreyfusard Soleil (voir La Gazette de France, 4 janvier 1899) et souscripteur modeste au Monument Henry (10 francs ; 3e liste), il combattit pour la cause dans La Gazette de France et participa dans la coulisse à la fondation de la Ligue de la patrie française (1ère liste), dont il comprit très vite l’inaptitude à toute action énergique et dans laquelle il ne joua aucun rôle ; il semble avoir d’ailleurs poussé précocement les activistes à la rupture et peut être considéré comme l’un des fondateurs en 1899 et surtout comme l’un des pères spirituels de l’Action française. Puis, malade, il se retira en 1901 à Cannes et mourut deux ans plus tard.
Il est difficile d’apprécier correctement l’importance doctrinale d’Amouretti, peu connu de son vivant et dont le renom posthume est probablement, pour une large part, le résultat d’une construction rétrospective de Maurras en quête de grands ancêtres. Il est néanmoins certain qu’il a influencé le chef de l’Action française, notamment par ses idées décentralisatrices, et l’a aidé, à la fin des années 1890, à élaborer sa doctrine, ce qui corrobore le fameux aveu de Maurras, « Je n’ai rien inventé du tout ». Dans l’affaire Dreyfus proprement dite, cet intellectuel totalement inapte à l’action n’a joué qu’un rôle moral et reste surtout connu pour son importante contribution à l’Enquête sur la monarchie en 1900.

Sources et bibliographie : Il n’existe semble-t-il aucune étude satisfaisante sur Frédéric Amouretti et l’on doit se contenter de l’hommage rendu par Maurras dans L’Étang de Berre […], Frédéric Amouretti (Paris, Édouard Champion, 1915) et d’une hagiographie d’André Cottez, Frédéric Amouretti (1863-1903), bibliographie de ses articles précédée d’une biographie (Paris, Plin, 1937). Les principaux articles publiés par Amouretti sont recensés dans l’article de P.-F. Fournier, « Bibliographie sommaire des écrits de Frédéric Amouretti », dans le Bibliographe moderne, t. 21, 1922-1923, p. 114-131.

Bertrand Joly

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