Baudin, Eugène, porcelainier et homme politique français, né à Vierzon (Cher) le 29 août 1853*, décédé à Granges-sur-Aube (Marne) le 11 avril 1918.
Ouvrier porcelainier, blanquiste, Baudin connut la prison en 1869 pour outrages à l’Empereur. Officier sous la Commune, il partit en exil avec Vaillant et fut, semble-t-il, condamné par contumace à la peine capitale. Revenu en France après l’amnistie de 1881, il fut élu, en 1884, conseiller municipal de Vierzon puis, l’année suivante, conseiller général du canton de La Guerche. Il se présenta alors aux élections législatives où il fut battu. Condamné à deux mois de prison et à cinq ans de privation de ses droits civiques pour l’action qu’il avait menée aux côtés de grévistes, il fut, à sa libération, triomphalement fêté, élu conseiller municipal et adjoint au maire de Vierzon. Réélu en 1886 à son siège de conseiller général, son élection fut annulée du fait de sa condamnation. Il se présenta alors, en 1889 aux législatives, comme socialiste anti-boulangiste, et fut élu. Candidat du Parti ouvrier français en 1893, il garda son siège de député du Cher et décida de ne pas se représenter en 1898. Il avait, depuis quelques temps déjà, rejoint le Comité révolutionnaire central (qui allait devenir en juillet suivant le Parti socialiste révolutionnaire et dont il sera membre de la Commission consultative). Il collabora aussi régulièrement à La Démocratie de l’Ouest.
En 1897, pendant les derniers mois de son mandat de député, il eut à voter sur des questions relatives à l’Affaire. Avec les socialistes, le 4 décembre, il vota contre l’ordre du jour qui proclamait le respect de la chose jugée et l’hommage rendu à l’armée (Lavertujon), et s’abstint sur celui de Pierre Richard et Marcel Habert qui « flétri[ssait] les meneurs de la campagne odieuse entreprise pour troubler la conscience publique » et, le 13 janvier 1898, après « J’Accuse… ! », il vota contre du jour du jour de Mun qui demandait au gouvernement de « prendre les mesures nécessaires pour mettre fin la campagne entreprise contre l’honneur de l’armée ». À ce même moment, il signa, en tant que membre de la Commission administrative du Comité révolutionnaire central, un manifeste dans lequel, se déclarant « aussi ennemi des antisémites que des juifs », Baudin et ses amis dénonçaient « à l’indignation publique les efforts par lesquels les chefs de l’armée et du Gouvernement cherchent à étouffer l’enquête sur les scandales et les trahisons militaires ». Ils en appelaient « à tous les bons citoyens pour exiger la lumière » (Le Tocsin populaire, 8-15 janvier 1898). Quelques jours plus tard, il signa le célèbre manifeste des députés socialistes qui engageait les prolétaires à se désintéresser d’une affaire qui était devenue « le champ de combat de deux fractions rivales de la bourgeoisie » (La Petite République, 20 janvier), et, pendant le procès Zola, signa la lettre collective de félicitations à Jaurès du Comité révolutionnaire central (La Petite République, 17 février 1898).
Dreyfusard, il signa la protestation en faveur de Picquart (5e liste). Au printemps 1899, après les incidents d’Auteuil, il signa le manifeste du Parti socialiste révolutionnaire engageant à se rendre à Longchamp et, peu après – logique de parti –, le manifeste « à la France ouvrière et socialiste » (Le Socialiste, 16 juillet 1899), condamnation de la présence d’un socialiste dans un gouvernement bourgeois, gouvernement qui de plus accueillait le fusilleur Galliffet, mais aussi – bien qu’il n’en fut peut-être conscient – net désaveu de Jaurès, du Jaurès défenseur de Dreyfus, et, implicitement, nouvel appel à se désintéresser de l’Affaire.
Malade, retiré de la vie politique, il vécut à Saint-Briac, en Bretagne, puis à Monaco où il reprit son métier.
Philippe Oriol