Berthe Henry

Henry, Berthe, née Berthe Amélie Bertincourt, né à Péronne (Somme) le 12 décembre 1872 , décédée à Péronne dans les années 1930.

Née Berthe, Amélie, Bertincourt, elle avait épousé le lieutenant-colonel Henry en 1892. Après la mort de son mari, en réponse aux articles de Reinach, publiés dans Le Siècle à partir des 25 octobre, 7 et 26 novembre et 6 [manquant à la BNF] et – 8 décembre 1898 et qui défendaient la thèse d’une complicité Henry-Esterhazy, la veuve Henry écrivit à Reinach une lettre, qui sera publiée dans le journal de Guyot, pour protester contre « des allégations d’autant plus abominables qu’il n’est plus là pour y répondre » (Le Siècle, 8 décembre 1898). Elle lui écrira une autre lettre publiée dans Le Siècle du lendemain). Encouragée par la presse nationaliste et plus particulièrement par La Libre Parole qui ouvrira, en décembre, une souscription pour couvrir les frais d’un procès (le monument Henry), Berthe Henry écrivit au bâtonnier de l’Ordre des avocats le 11 pour lui faire part de son désir « de conduire le calomniateur en cours d’assises et d’étaler là, aux yeux de tous, l’infâme lâcheté de ceux qui, pour réhabiliter leur riche client, s’essaient à déshonorer, après sa mort, un fils du peuple sorti du rang […] ». Elle assigna finalement Reinach, grâce à l’argent récolté par la souscription de La Libre Parole, le 10 janvier 1899. L’affaire vint en cour d’assises le 27 janvier et fut renvoyée, Reinach, après le refus qui avait été opposé à sa demande d’un sursis jusqu’à l’arrêt de la Cour de cassation, s’étant pourvu en cassation, pourvoi déclaré suspensif. Reinach s’étant désisté de son pourvoi le 6 mai 1899, la veuve Henry lança de nouvelles assignations. Fixée au 26 juin, puis au 25 août, l’affaire fut renvoyée, à l’accord des parties, au 21 décembre, après Rennes. Renvoyée par le président Mercier le 14 décembre à une date indéterminée la veuve Henry écrivit à Waldeck-Rousseau (La Libre Parole, 19 décembre). Devant revenir le 19 mars 1900, l’affaire fut de nouveau renvoyée. La loi d’amnistie, alors en discussion, était à l’origine de ces successifs reports. La veuve Henry écrivit au président de la commission sénatoriale pour une nouvelle protestation (La Libre Parole, 12 mars 1900). Le 19 octobre, la veuve Henry lança de nouvelles assignations et l’affaire vint le 3 décembre. À nouveau ajournée, elle fut incluse dans la loi d’amnistie votée. Le 21 février 1901, la veuve Henry assignait à nouveau Reinach, cette fois devant la juridiction civile et demandait 200 000 francs de dommages-intérêts. Appelé le 30 octobre 1901, le procès fut renvoyé au 27 novembre, puis au 5 février 1902 et enfin au 28 mai. Le 12 juin 1902, Reinach était condamné à payer 500 francs à la veuve Henry et 500 francs à son fils. Reinach fit appel et le 28 mai fut confirmé le jugement de première instance. Reinach se pourvut en cassation et mit fin à l’affaire en se désistant de son pourvoi en octobre 1906. La veuve Henry refusera de percevoir les dommages-intérêts versés par Reinach.
Elle apparut aussi dans l’Affaire à un autre titre : comme témoin. Appelée à déposer à Rennes, elle raconta comment son mari avait reçu et reconstitué le bordereau et parla du faux, fabriqué « en présence des agissements du colonel Picquart, pour sauver l’armée qui se trouvait dans une impasse terrible par la mauvaise foi de ses ennemis » (p. 263) et que pour ce faire il s’était servi « des éléments verbaux qui lui avaient été donnés quelques jours auparavant » (p. 264).
En 1902, c’est sous son nom que sera publiée la brochure de propagande, devant « être remise gratuitement » et ne pouvant « en aucun cas […] être vendue », intitulée : L’Affaire Henry-Reinach. Plaidoiries de Me Chenu et de Me Saint-Auban (s.n., Imp. E. Masson) : « Pour la mémoire de mon pauvre mari accusé d’un crime infâme par M. Joseph Reinach, pour mon fils, j’ai le devoir de publier les plaidoiries de mes deux défenseurs. / À ceux qui m’ont aidée, à ceux qui m’ont soutenue, à ceux aussi, à ceux surtout, s’il en est, que la calomnie ébranla, je dédie ces démonstrations victorieuses ».
Par la suite, Berthe Henry, qui perdra son fils au front, se tiendra « dans la plus complète réserve et le recueillement le plus profond » (Lettre à Charpentier du 2 avril 1935, in Charpentier, Les Côtés mystérieux de l’affaire Dreyfus, p. 128).

Sources et bibliographie : sa déposition à Rennes se trouve dans Rennes I, p. 261-264. Ses lettres à Reinach ainsi que sa lettre au bâtonnier on été publiée dans Reinach, Tout le crime, Paris, Stock, 1900, pp. 555-556 et 558-560. Celles du 7 et 8 septembre 1898, publiées dans Le Siècle des 8 et 9, sont conservées à la BNF sous la cote n.a.fr. 13574, ff. 187-191. On trouvera, de nombreux extraits de sa correspondance de 1935 avec Charpentier dans Les Côtés mystérieux de l’affaire Dreyfus, Paris, Rieder, 1930, p. 127-141

Philippe Oriol

 

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