Victor Bernier

Sources et bibliographie : sa fiche de police a été reproduite dans Bruno Fuligni dir., Dans les archives des services secrets, Paris, Gallimard, Folio, p. 62 et 64.

Philippe Oriol

Bernier, Joseph, Victor, Auguste, entrepreneur français, né à Pont-sur-Yonne (Yonne) le 21 juillet 1845*, date de décès inconnue.

Juré au procès Zola, Bernier, entrepreneur de plomberie, tôlerie et fumisterie, fut ainsi présenté dans l’enquête de police dont il fut l’objet :

Le susnommé, qui est du culte catholique, paraît ne s’occuper que de ses affaires commerciales et se désintéresser complètement de la politique ; on le croit toutefois républicain modéré. Il n’est abonné, croit-on, à aucun journal politique, mais il achèterait au numéro « Le Petit Parisien », « Le Petit Journal » et quelquefois « L’Écho de Paris » ou « Le Journal » (archives PP. Ba 1302 et 1303).

Quant aux dreyfusards, ils le considéraient, avant le procès, comme « bon » (fonds Labori, BNF, n.a.fr. 28046 [32]). Ayant voté la condamnation, il déclara à La Patrie, au lendemain du procès, sa satisfaction :

Je me félicite […] du verdict rendu. C’est le juste châtiment qu’il convenait d’infliger aux insulteurs de l’armée. […] Qu’on ne vienne pas dire, comme l’a fait la défense, que nous avons obéi aux injonctions du gouvernement ou à celles des généraux, car nous ne nous sommes inspirés que des intérêts supérieurs de la patrie et de l’honneur de l’armée » (Géo Baumier, « Le Jury. Chez M. Victor Bernier, 25 février 1898).

Après la mort d’Henry, le 8 septembre 1898, interrogé par L’Aurore, il déclara qu’il ne savait pas ce qu’il aurait « décidé s’[il avait] connu le faux Henry ». Il ajoutait qu’il souhaitait « qu’on en finisse avec cette histoire qui a trop duré ! Qu’on fasse la lumière » (Albéric Darthèze, « S’ils avaient su »). Le lendemain, Le Soir donna une autre interview de Bernier démentant les propos rapportés par L’Aurore :

Je n’ai jamais prononcé ces paroles : « Qu’on en finisse avec cette histoire qui a trop duré. Qu’on fasse la lumière ». Lorsque j’ai donné mon avis comme juré, je l’ai fait loyalement, selon ma conscience. Aussi n’ai-je aucune réflexion à ajouter au verdict que j’ai contribué à faire prononcer.

Et il précisait :

J’estime que la Patrie doit passer avant tous les intérêts. J’ai une confiance absolue en nos juges militaires. […] J’ai jugé dans mon âme et conscience de juré et d’honnête homme (Albert Randon, « Chez M. Bernier », 9 septembre 1898).

Dans L’Aurore du lendemain, Darthèze maintint bien sûr, contre « le petit jeu » du Soir, les informations qu’il avait données, se contentant de déclarer qu’il attendait l’âme tranquille les seuls rectificatifs qui pussent compter : ceux des jurés (« Interview des jurés du procès Zola »). Darthèze ne reçut jamais rien. Le lendemain, pourtant, parut dans La Patrie, une nouvelle interview dans laquelle Bernier déclarait : « […] je réprouve de toutes mes forces la campagne abominable qui se poursuit et, si j’avais à nouveau à remplir mon devoir de juré, je le ferais avec la même conscience de patriote et d’honnête homme » (« Série de démentis », 10 septembre 1898).

Sources et bibliographie : sa fiche de police a été reproduite dans Bruno Fuligni dir., Dans les archives des services secrets, Paris, Gallimard, Folio, p. 62 et 64.

Philippe Oriol

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