Aubry, Raoul (Jean, Félix, Firmin Lenclud dit), journaliste français né à Mirande (Gers) le 6 juillet 1872*, décédé à Paris le 26 février 1915*.
Rédacteur à L’Éclair, à La Dépêche de Toulouse, au Gil Blas, au Siècle, au Figaro sous son véritable nom ou sous divers pseudonymes, il signa un certain nombre de reportages essentiellement informatifs sur l’Affaire (sous le pseudonyme de F. Raoul-Aubry) pour Le Matin (voir par exemple notice Varinard) et, semble-t-il, un grand nombre non signés pour Le Temps (auquel il collaborait depuis 1896 et où il publiera jusqu’à sa mort). Des reportages dont l’attribution de ce fait est impossible à l’exception de l’interview qu’il réalisa de Dutrieux, président du jury au procès Zola. En effet, dans le numéro du 25 février, il publia un article dans lequel Dutrieux déclarait que lui et ses collègues du jury ne s’étaient prononcés que sur la diffamation et aucunement sur le fond de l’Affaire qui avait motivé l’article incriminé : « Nous n’avions à nous occuper nullement de la question Dreyfus. Il y a des voies légales que peuvent suivre les défenseurs de l’ancien capitaine, et, sans doute, les suivront-ils désormais. Je crois même qu’ils peuvent réussir, qu’ils réussiront maintenant… Laissez-moi vous avouer que je le souhaite » (« Après le procès d’hier. Les impressions d’un juré »). Le lendemain, cette interview avait été démentie dans Le Soir par le principal intéressé : « C’est faux, archi-faux, je n’ai jamais dit cela, je n’ai jamais dit quoi que ce soit qui puisse s’interpréter ainsi » (« Un démenti au “Temps” », 26 février). Pourtant, comme nous l’a révélé Alain Pagès, il semble bien qu’il n’avait pas dit autre chose. Raoul Aubry, en réponse au démenti du Soir, avait écrit à Dutrieux :
Vous savez fort bien que vous m’avez dit les paroles que, cependant, vous niez avoir prononcées. Ce n’est pas d’une excessive honnêteté, cela ? J’aurais pu, d’ailleurs, rappeler dans le journal que vous aviez ajouté, textuellement, parlant des amis de Dreyfus qui poursuivaient la révision : « Même je les y aiderai, si je le puis… mais cela ne le dites pas… » Vous voudrez bien, j’espère, monsieur, me fournir quelques explications. Elles resteront, je vous le promets, entre nous ; mais j’ai le droit de savoir pourquoi vous avez nié ces propos que vous m’avez plusieurs fois répétés.
Dreyfusard, Aubry signera la protestation contre l’amnistie (L’Aurore, 29 janvier 1900).
Sources et bibliographie : Son dossier de la Légion d’honneur se consulte à la cote : LH/1586/18. Sur l’affaire Dutrieux, voir Alain Pagès, Émile Zola, un intellectuel dans l’affaire Dreyfus, Paris, Librairie Séguier, p. 198-200.
Philippe Oriol